mardi 19 juin 2012

On peut se passer complètement de pétrole


La France émet annuellement 400 millions de tonnes de CO2 directement, et 550 millions de tonnes si on fait la balance du contenu en CO2 entre les produits importés et les produits exportés. Sur ces centaines de millions de tonnes émis chaque année, environ 50 millions sont dus à la production d'électricité.

Alors, au lieu de vouloir révolutionner la production d'électricité, avec une efficacité plus que douteuse (voir mon article sur l'éolien et le photovoltaïque), attaquons-nous donc aux principales émissions de CO2, que sont la consommation de pétrole, de gaz et de charbon, pour les besoins domestiques, industriels et de transport.

Les technologies qui nous permettront de produire de l'électricité sans émission de CO2 et sans nucléaire n'existent pas aujourd'hui, et il n'est pas du tout sûr qu'elles existeront un jour. Mais les technologies qui pourraient nous permettre de nous passer totalement de pétrole (et de gaz et de charbon) sont à portée de main. Il suffit de faire l'effort, et dans 15 à 20 ans, nous pourrons faire un bras d'honneur à ces tyrans sanguinaires et à ces roitelets misogynes qui nous vendent le pétrole à prix d'or.

Tout d'abord, une grosse part de la consommation de ressources carbonées fossiles est à poste fixe, essentiellement pour la production de chaleur : chauffage de locaux industriels et domestiques, chaleur procédé pour l'industrie. Ces usages peuvent être remplacés aisément par une combinaison optimale entre économie d'énergie et électricité (voir mon article sur les économies d'énergie). Entrent aussi dans cette catégorie d'usage fixe, le train (dont les lignes peuvent être électrifiées) et tous les moteurs à combustion interne utilisés en fixe.

Puis, se posent les problèmes de transport, avec tout d'abord les trajets courts : les trajets de moins de 100 km représentent les 2/3 des km parcourus. Cette autonomie est aisément accessible aux batteries actuelles. Equipons-nous de voitures électriques, sans attendre l'avènement de batteries ultraperformantes.

Il reste quand même les trajets longs (bateaux, avions, automobiles et camions longue distance), et l'usage du pétrole comme matière première. On peut réduire ces trajets longs par le ferroutage ou le "bateau-routage", mais la production de carburant liquide et de matière première hydrocarbonée reste nécessaire.
Et c'est pour ces usages que la biomasse est irremplaçable, en tant que source de carbone non polluante. Je ne parle pas des biocarburants de première génération qui entrent en compétition avec les usages alimentaires : je considère qu'il est criminel d'utiliser du blé ou du colza pour produire du carburant alors que des gens meurent de faim.
Je parle des biocarburants de 2ième génération, qui utilisent des déchets végétaux, actuellement sans usage, si ce n'est pour la production de chaleur ou d'électricité : branches et feuillage des arbres coupés pour le bois de leur tronc, tiges de blé, etc… Plusieurs unités pilote sont en projet en France, il existe au minimum le projet du CEA, Syndiese, et celui de Total/Sofiprotéol.

La transformation de la biomasse en carburant liquide (biomass to liquid, en abrégé BtL) s'effectue en 2 étapes : la première consiste à pyrolyser la biomasse pour produire un mélange d'hydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO), la deuxième à synthétiser le carburant liquide (ou l'hydrocarbure en tant que matière première pour la pétrochimie) à partir de ce gaz, par le procédé Fischer-Tropsch. Ce dernier procédé a été mis au point par des chimistes allemands en 1923, et a été largement utilisé par le 3ième Reich pour fabriquer de l'essence à partir du charbon.
Afin d'augmenter le rendement de transformation de la biomasse en carburant, il est avantageux d'utiliser de l'électricité (d'origine décarbonée, par exemple nucléaire) pour la pyrolyse, plutôt que la combustion de la biomasse elle-même. De plus, le gaz issu de la pyrolyse est relativement pauvre en hydrogène, et il est donc avantageux d'y ajouter de l'hydrogène provenant de l'électrolyse de l'eau (elle-même alimentée par de l'électricité décarbonée), pour que tout le carbone de la biomasse initiale soit transformé en hydrocarbure.

Cette usine BtL accepte de la biomasse comme matière première, mais peut aussi recycler les déchets ménagers.
Dans un avenir plus lointain, la biomasse pourrait être constituée d'algues sélectionnées dans ce but, cultivées en milieu artificiel ou naturel, avec des rendements dépassant tout ce que les végétaux actuellement connus permettent d'atteindre. Il s'agit des biocarburants de 3ième génération.

Dans le cadre d'une stratégie énergétique idéale, on produirait l'électricité uniquement à partir de sources non carbonées : nucléaire, hydraulique, éolien, photovoltaïque, autres renouvelables.
L'hydraulique est extrêmement utile parce qu'il permet d'ajuster la production à la demande, en laissant l'eau s'accumuler dans les barrages lors des creux de consommation, et en la turbinant lors des pics de consommation. Certaines installations (STEP) permettent aussi le pompage de l'eau d'une réserve à basse altitude vers une réserve à haute altitude, afin de stocker l'électricité.
L'hydraulique n'est néanmoins pas suffisant pour compenser l'extrême variabilité de la consommation d'électricité, surtout si l'on introduit éolien et photovoltaïque qui génèrent une variabilité non maîtrisée de la production.
De plus, les centrales nucléaires sont plus efficaces, plus sûres et moins génératrices de déchets, si elles fonctionnent à plein régime en permanence.

Dans le cadre d'une stratégie énergétique idéale, les capacités de production d'électricité seraient surdimensionnées, et les surplus d'électricité seraient alors écoulés pour la charge des batteries de véhicule, le fonctionnement des usines BtL, et la production d'hydrogène.

Le pétrole (ainsi que le gaz et le charbon) n'est pas encore tout à fait assez onéreux pour qu'une telle stratégie énergétique soit rentable. Il faudrait que le baril soit vers 150 $. Mais, le surcoût est largement compensé par les avantages :
  • Réduction drastique des émissions de CO2. Il faudra d'ailleurs un jour finir par instituer cette fameuse taxe carbone qui rendrait rentable ce type d'industrie…
  • Annulation du déficit de la balance commerciale de la France : en 2011 la France a importé pour 62 milliards d'€ de pétrole et gaz, soit à peu près le montant du déficit de la balance commerciale.
  • Ré-industrialisation de la France, création de dizaines de milliers d'emplois locaux. Notons bien que la tendance actuelle est de placer les sites de raffinage de pétrole fossile à proximité des sites d'extraction, ce qui se traduit par la perte de milliers d'emplois en France.
  • Variable d'ajustement entre la production d'électricité et la consommation.
  • Indépendance énergétique : pour défendre nos valeurs démocratiques, il vaut mieux ne pas dépendre de régimes autoritaires et phallocrates pour la fourniture d'une matière aussi stratégique que le pétrole.

mardi 12 juin 2012

Crise et justice

La crise qui a commencé en 2007 et que nous vivons toujours aujourd'hui, n'est pas seulement une crise de la dette. Ni même une crises des dettes, puisque commençant avec les subprimes, qui représentent des dettes de particuliers américains, nous sommes passés aux dettes des états européens.

Cette crise est tout simplement le symptôme d'un monde en déséquilibre, qui bouge et se transforme pour retrouver son équilibre. Un monde qui bascule, entre d'un côté des pays riches qui s'endettent pour maintenir et augmenter leur niveau de vie, et d'un autre côté des pays pauvres qui travaillent comme des forçats pour sortir de leur misère. Cette évolution est souhaitable, parce qu'elle conduit à une meilleure répartition des richesses.

Les pays riches ont jusqu'à présent profité de la mondialisation pour augmenter leur pouvoir d'achat, au détriment des pays pauvres. Combien coûterait une un téléphone portable s'il était fabriqué entièrement en France : 1000 €? Plus encore? Les délocalisations ne sont pas la seule conséquence de la mondialisation, il y a aussi les produits manufacturés bon marché. Le Français moyen manque de cohérence : celui qui achète bon marché des voitures fabriquées en Corée est le même que celui qui manifeste contre les délocalisations…

Et les pays pauvres, grâce à leur faible coût de main d'œuvre accumulent des excédents commerciaux qui sont l'exacte image, inversée, des dettes des pays riches, au prix de conditions de travail dignes de l'esclavage : horaires délirants, pas ou peu de congés, travail des enfants, précarité de l'emploi,…

L'avenir n'est pas écrit, mais cette tendance lourde vers le "travailler plus pour gagner moins" dans nos pays riches pourra nous faire basculer dans la misère, comme la Grèce, si nous persistons à nier la réalité. Si, au contraire, nous ouvrons les yeux et retroussons les manches, nous pourrons limiter la casse en un "travailler plus pour préserver notre niveau de vie".
Ajoutons à cette tendance la croissance de la population mondiale, l'augmentation du niveau de vie moyen de cette population, et, face à cela, la limitation des ressources de notre planète, on voit que l'avenir est fait de sang, de sueur et de larmes.
Dans ces conditions, il est très dangereux de promettre des lendemains qui chantent, n'est ce pas Mr Hollande?

Si nous voulons préserver notre niveau de vie, nous devons retrouver une croissance, mais pas n'importe laquelle, et surtout pas cette croissance basée sur la consommation et la dette que nous avons connue depuis les années 1980. Non, il faut une croissance basée sur la production.
Par exemple, produire nous-mêmes notre pétrole, sur nos territoires, est possible et techniquement à portée de main (un jour je prendrai la peine d'expliquer comment, mais l'électricité nucléaire est essentielle pour cela), et suffirait à compenser notre déficit commercial, tout en générant des dizaines de milliers d'emplois locaux. De plus, l'environnement ne s'en portera que mieux, parce que l'on utilisera pour cela uniquement des ressources sans émissions de CO2.

Il faut aussi favoriser l'emploi en France, et pour cela, il existe de nombreux leviers, que l'actuel gouvernement actionne systématiquement en sens inverse :
  • Diminuer la pression fiscale sur les entreprises pour l'augmenter sur la consommation (TVA dite "anti-délocalisation").
  • Encourager, flatter et féliciter les riches, et surtout les autoriser à rester riches. En particulier si leur richesse permet de créer ou maintenir des emplois en France. Bref, commencer par supprimer l'impôt sur la fortune, cet impôt imbécile qui, en faisant fuir la richesse hors de France, coûte à l'état plus cher qu'il ne rapporte.
  • Limiter la pression administrative qui s'exerce sur les entreprises à travers une prolifération de lois, de règlements et de normes. Et aussi stabiliser la réglementation, en perpétuelle évolution dans notre pays. Notons toutefois que sur ce point particulier, c'est surtout notre ancien gouvernement qui s'est distingué en augmentant considérablement la pression administrative. Le nouveau gouvernement n'a pas encore eu le temps de faire ses preuves.
  • Mettre à disposition une électricité abondante, de bonne qualité (disponible quand on en a besoin) et bon marché. En d'autres termes, construire de nouvelles centrales nucléaires plutôt que d'arrêter les anciennes.
  • Rendre l'emploi flexible.
 On notera à propos du dernier point, que dans notre pays, la flexibilité de l'emploi, nécessaire à une industrie qui doit faire face à un monde en perpétuelle évolution, est totalement assumée par un quart de la population active (emplois précaires, 12 %, et chômeurs). Face à cette population défavorisée, un quart environ des actifs sont fonctionnaires, travaillent moins, sont mieux payés, bénéficient d'un emploi à vie, et consomment un sixième de notre PIB.
Voilà une grande injustice, que notre Président, qui met son mandat sous le signe de la justice, ne manquera pas de corriger?
Mettons tout de suite les choses au point : élever le statut de ces emplois précaires vers celui, beaucoup plus favorable, de la fonction publique ne peut aboutir qu'à la disparition de ce qui reste de notre industrie, et à une augmentation considérable du chômage dans notre pays.
Non, la solution est de réduire le nombre de fonctionnaires, et de réduire leurs avantages. En conséquence, on pourra relâcher la pression fiscale sur les entreprises, qui pourront alors exporter, se développer, embaucher, et offrir plus d'emplois stables.

Au travail…
Ou sinon, sauve qui peut!